Derrière deux fenêtres jumelles, sous un même ciel larmoyant, deux mondes s'éveillaient. Le premier homme, les poings serrés contre la vitre froide, voyait dans chaque goutte un bonheur envolé, une heure de soleil volée par un destin aveugle. Chaque éclaboussure était une amertume, le glas d'un jour gâché.
Son voisin, cependant, souriait à l'ondée. Dans ses yeux brillait la lueur joyeuse de l'enfance ; il devinait, derrière le voile liquide, la nature à l'œuvre. « Elle arrose mes roses sans me demander un sou », murmurait-il, confiant.
Tandis que l'un épuisait sa colère à maudire les nuages, l'autre se blottissait dans son fauteuil, un livre ouvert sur ses genoux, bercé par le doux tambourinage, cette symphonie où la terre boit et se régénère.
La pluie tombait, unique et impartiale. Elle n'était ni bonne ni mauvaise. Elle était un cadeau que seul le regard de chacun pouvait déballer.
Ainsi est le plus grand secret : la vie tient moins dans les événements qui nous arrivent que dans le prisme coloré ou terne que nous choisissons de poser sur eux. Notre perception est notre pouvoir le plus intime. Le bonheur n'est pas une question de météo, mais un climat intérieur ; une décision silencieuse, renouvelée à l'aube de chaque jour, de trouver une raison de remercier la vie.
